Note :
http://www.myspace.com/larumeurofficiel
Quand il y a de l'agressivité en face, obligé de parler sur le ton de la menace, question de dignité.
Deux ans après le splendide L'ombre sur la mesure et dans l'attente d'un procès pour diffamation publique envers la police nationale, La Rumeur est de retour avec un disque offensif - évidemment
offensif. Son titre, sa pochette, ses sons et ses textes : tout converge vers le déchaînement d'une attaque violente mais précise. Car au-dessus de ce Regain de tension plane l'ombre du procès,
et derrière lui de la police, d'une justice souvent complice, de la politique sécuritaire, et finalement de tout ce qui tend à faire perdre Nom, prénom, identité...
En résistance à ces ombres, La Rumeur affirme justement plus que jamais son identité, bâtie autour de propos à double-tranchant, sans cesse perchés sur un "mince fil qui manque de casser d'un
coup"... La précarité de cet équilibre se ressent d'ailleurs souvent dans le timbre de la voix quand La Rumeur rappe à bout de souffle et avec les tripes, notamment Hamé (Ils nous aiment comme le
feu) et Philippe (Quand le diable est au piano). Mais c'est surtout dans les textes que La Rumeur joue au funambule, car les formules extrêmes se succèdent, notamment chez Philippe et Ekoué qui
entretiennent une violence exprimée par des insultes gratuites, des propos lapidaires, et des prévisions menaçantes. "De la confiture pour les porcs" : voilà ce qu'offre en somme La Rumeur. Car
pour les censeurs, radios, syndicats de police et autre Ministère de l'Intérieur qui douteraient encore de la haine que leur porte La Rumeur, chaque rime se dresse et la leur vomit en pleine face
: vulgairement certes, mais aussi avec poésie. Et le vacarme devient arme :
A nous le bruit, et ses effractions en série
Son sous-sol, ses clés d'acier, et ses clés de sol
A nous le bruit, à nous le bruit
D'une plume toujours aussi aiguisée et littéraire (tout comme celle de Mourad), Hamé s'adresse dans Inscrivez greffier au tribunal, "n’exprime aucun regret", et invoque contre sa propre personne
l'article 25 bis, alinéa premier : expulsion du territoire pour atteinte à la sûreté de l'Etat. Cet excellent morceau solo, nourri entre autres du texte boucher La violence et l’ennui de Léo
Ferré, rejoint les couplets du même Hamé, dans P.O.R.C et le superbe Ils nous aiment comme le feu, tous obsédés par la censure et le procès à venir.
Pendant que la censure peine de tous ses efforts
Et que d'obscurs syndicats de porcs
En cas d'encombrantes bavures invoquent le coup du sort
Et nous convoquent leur état-major...
Dans un style beaucoup plus brut et quasi-parlé, Ekoué se charge d'enfoncer violemment le clou déjà planté par Philippe dans son réquisitoire Soldat Lambda, en faisant preuve d'un cynisme
incendiaire notamment dans Les mots qui me viennent : "et oui je siffle la Marseillaise, et je te baise, c'est comme ça". Le respect envers l'hymne national, envers la police, des concepts aussi
foireux que celui d'intégration ou des euphémismes de type "bavures", autant de Mots du maître "à suivre à la lettre" que pourrait recenser Hamé pour mieux leur "tordre le cou"...
Quand le diable est au piano
Qu'il joue la note de trop
Quand le piano est au diable
Ce que la corde est au cou des présumés coupables
En point culminant de l'album, Quand le diable est au piano offre une atmosphère sombre et funèbre parfaitement maîtrisée, avec une entrée en scène apocalyptique de Philippe qui déclenche quatre
couplets et un superbe refrain nous entraînant au cœur du crime policier… c’est-à-dire au cœur de la prétendue diffamation : coup de maître qui démontre par ailleurs l'alchimie remarquable opérée
entre les quatre membres du groupe, tout comme les deux autres excellents morceaux collectifs que sont A nous le bruit et le plus étonnant Paris nous nourrit, Paris nous affame (où le groupe se
voit épaulé pas l'ancien guitariste de Noir Désir Serge Teyssot-Gay).
Inutile de dresser une comparaison avec l'album précédent, d'en regretter des aspects ou d'en réclamer d'autres, que ce soit dans les sons comme dans l’écriture : Regain de tension est un disque
de circonstance, par lequel La Rumeur marque au fer rouge l'année 2004 de prises de position tranchées correspondant tout à fait à son époque et à son actualité. En ce sens, cet album est tout
simplement parfait.
par PJ
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Origine du Groupe : France
Style : Rap Fusion , Hip Hop
Sortie : 2004
Tracklist :
01. l'encre va encore couler
02. a nous le bruit
03. ils nous aiment comme le feu
04. soldat lambda
05. p.o.r.c. (pourquoi on resterait calme)
06. inscrivez greffier
07. nom, prénom, identité
08. paris nous nourrit, paris nous affame
09. les mots qui me viennent
10. quand le diable est au piano
11. maître mot, mots du maître
12. nous sommes les premiers sur...(bonus track)
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